Tragédie Maritime

Tragédie Maritime

Article
JournalisteAchille Hubert
JournalLe Radar
Date8 janvier 1991

 

Soudain, sans crier gare, la tragédie s’abat sur un petit peuple. Pourtant, rien ne laissait présager une telle catastrophe. On se préparait fébrilement pour les FÊTES. Et il en était probablement ainsi pour l’équipage du Nadine. On venait d’effectuer d’excellentes prises et on avait bien hâte d’arriver à la maison pour revoir épouse, enfants, parents, amis mais aussi pour aller dans les magasins acheter les cadeaux de Noël pour la famille. Et puis la poche de poisson sur le pont du Nadine, c’était un peu comme un bonus, la cerise sur le gâteau. On était content, satisfait, on avait hâte de fêter la Noël avec les siens.

Puis, tout-à-coup, sans avertissement, on est arraché de son sommeil et plongé en plein drame. On n’a pas le temps de penser, de planifier; c’est le sauve-qui-peut; le bateau penche dangereusement, il va bientôt couler; puis la noirceur totale. Comment voulez-vous mettre convenablement, dans de telles conditions, les costumes d’immersion ? On est trop pris au dépourvu, on est piégé. Et puis soudainement, tous sont projetés à l’eau, sauf ceux qui se sont réfugiés dans la cabine du Nadine. Et là commence la longue attente du secours; on en finit plus d’attendre… que de choses doivent passer dans l’esprit et le cœur dans ces moments dramatiques! Et puis, peu à peu, pour plusieurs (il y en aura huit) les forces déclinent, l’hypothermie fait inexorablement son œuvre, la paralysie s’empare de tous les membres…c’est la fin. Deux d’entre eux, le capitaine Robert qui a réussi, à cause de son expérience de plongeur, à mettre le costume, et son frère Serge qui a eu la chance d’échoir sur un radeau de sauvetage, attendront jusqu’au petit matin avant d’être secourus et rescapés. Huit heures d’attente…dans l’incertitude quant à la fin du drame…survivre ou mourir.

C’est un peu ce drame vécu par tous ces valeureux pêcheurs que les Madelinots et Madeliniennes ont tenté de sentir, de comprendre, d’empathiser pendant les jours qui ont suivi la catastrophe. Comment cela a-t-il pu se produire ? Pourquoi un tel drame et dans un moment pareil ? Toutes des questions qui demeurent sans réponse. Le plus important dans tout cela c’est le courant de sympathie, de solidarité qui a traversé le cœur de tous les Madelinots. Sympathie pour les familles durement touchées, les pères et mères de ces jeunes hommes fauchés en pleine jeunesse, de ces jeunes femmes et des enfants privés de la présence de leur époux, de leur père, des frères et sœurs de ces disparus qui ne pourront plus converser joyeusement avec eux, de tous ces amis sincères.

Ce drame a blessé beaucoup de monde aux Iles et certains l’ont été plus profondément que d’autres. Il faudrait que tous et toutes se donnent la main pour aider ceux et celles qui furent les plus affectés par cet événement, pour leur accorder support, soutien, amitié. Bien plus, il faudrait que des services de psychologue soient accordés à ces personnes pour les aider à passer au travers cette tempête et en sortir sain et sauf.